La Russie s'apprête à révolutionner son système financier avec la prochaine introduction du rouble numérique, sa monnaie numérique de Banque centrale (CBDC). Le lancement de cette monnaie soulève toutefois des inquiétudes quant à l'avenir des banques privées russes. Anatoly Aksakov, un éminent législateur du pays, envisage même la possibilité que cette monnaie numérique rende ces établissements bancaires obsolètes.
La menace du rouble numérique
Lors d'un récent forum médiatique, M. Aksakov a déclaré que les banques traditionnelles russes pourraient perdre de leur importance à mesure que le rouble numérique gagnera du terrain. Cette vision funeste repose sur la conviction que la technologie blockchain sous-jacente au rouble numérique révolutionnera la fourniture des services financiers dans le pays. D'après M. Aksakov, les activités menées par les banques traditionnelles deviendront alors moins pertinentes aux yeux du public.
Le législateur russe encourage vivement ces institutions à explorer de nouvelles opportunités en terme d'infrastructure des actifs financiers numériques. Il est convaincu que ces dernières devront investir dans l'amélioration de leur infrastructure pour pouvoir tirer pleinement parti des avantages offerts par les CBDC.
Selon lui, la limitation imposée par la Banque centrale sur les transactions en roubles numériques, fixée à 200 000 roubles par jour, vise à déconnecter progressivement le système bancaire de l'argent liquide. Les transactions entre les établissements financiers et la Banque centrale deviendront alors exclusivement numériques, ce qui nécessitera une adaptation des banques privées.
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Les enjeux géopolitiques de la CBDC russe
Le lancement du rouble numérique revêt une importance capitale pour la Russie, en particulier dans le contexte des sanctions occidentales liées à l'invasion de l'Ukraine. Cette monnaie numérique est perçue en interne comme un moyen d'échapper à ces sanctions et de se refaire une santé économique.
Avec le lancement des premiers tests en conditions réelles du rouble numérique, la Russie rejoint un groupe de plus de 20 pays qui expérimentent les monnaies numériques de banque centrale. Mikkel Morch, fondateur du fonds d'investissement ARK36, souligne que cette initiative s'inscrit dans une « guerre géopolitique entre les pays pro-dollar et les pays anti-dollar ».
Au-delà des implications pour le secteur financier et des enjeux géopolitiques, le rouble numérique présenterait également de nombreux avantages potentiels pour les Russes. Olga Skorobogatova, gouverneure adjointe de la Banque de Russie, estime que les institutions bancaires s’en serviront pour proposer à leurs clients des programmes de fidélisation afin de rester compétitives. La CBDC cesserait alors d'être une menace pour les banques traditionnelles du pays comme le craint le chef du comité bancaire de la Douma d'État.
