Une bataille législative s’annonce au Congrès américain sur la régulation des actifs crypto. Dans un contexte de tensions politiques persistantes, un groupe de sénateurs démocrates tend la main aux républicains pour co-écrire une législation historique sur la structure du marché des actifs numériques. Derrière cette volonté d'unité transpartisane se jouent des intérêts économiques colossaux et une redéfinition potentielle de l’écosystème crypto aux États-Unis.
Une collaboration inattendue sur fond de pression réglementaire
Douze sénateurs démocrates, issus des comités bancaires et agricoles du Sénat, ont publié une déclaration commune vendredi dernier, exprimant leur ouverture à une rédaction bipartisane du projet de loi républicain sur la structure de marché des actifs crypto. « Nous espérons que nos collègues républicains accepteront un processus de co-rédaction bipartite, comme c'est la norme pour une législation de cette envergure », peut-on lire dans le communiqué. Cette main tendue survient alors que le projet de loi, porté par les républicains, approche d’un vote au Senate Banking Committee.
L’initiative démocrate vise notamment à garantir que le texte intègre plusieurs priorités clés, comme la lutte contre la finance illicite et le comblement du vide juridique sur le marché au comptant des actifs crypto non considérés comme des titres. Les sénateurs appellent aussi à inclure des mécanismes de prévention contre la corruption et les abus. Cette position marque un virage stratégique, les démocrates reconnaissant la nécessité d’un cadre clair, tout en gardant la main sur les équilibres du texte.
Tensions internes et calendrier politique chargé
Malgré cet appel à la coopération, tous les démocrates ne sont pas alignés. La sénatrice du Massachusetts Elizabeth Warren, connue pour sa ligne dure envers l’industrie crypto, a refusé de signer la déclaration. Dans une interview accordée pendant la pause estivale du Congrès, elle a déclaré qu’elle ne soutiendrait pas une loi « écrite par l'industrie crypto ». Son absence illustre les divergences internes au sein du Parti démocrate sur la régulation des actifs numériques, freinant une éventuelle unité de front.
De leur côté, les républicains poursuivent leur agenda. Après l’adoption du CLARITY Act par la Chambre des représentants en juillet, ils entendent bâtir leur propre version sénatoriale via le Responsible Financial Innovation Act, dont le vote au comité bancaire est prévu avant fin septembre, selon la sénatrice Cynthia Lummis. Le texte devrait ensuite passer devant les comités bancaires et agricoles, avec un objectif clair : un vote en séance plénière avant la fin de l’année. Parallèlement, les républicains ont rencontré des leaders de l’industrie crypto, dont Brian Armstrong (PDG de Coinbase), pour renforcer l’alignement entre le projet de loi et les attentes du secteur.
Si ce projet venait à passer, il pourrait poser les bases d’un nouveau cadre réglementaire pour la crypto aux États-Unis, susceptible de redessiner en profondeur les contours de l’innovation financière. Mais entre la pression politique, les désaccords internes et les enjeux de souveraineté économique, l’équilibre s’annonce précaire.