Quand un État décide d'investir directement dans les cryptomonnaies, ce n’est jamais anodin. Et quand il s'agit du Kazakhstan, acteur majeur du minage mondial et pionnier d’un cadre réglementaire crypto depuis 2022, cela mérite toute l’attention du marché. Ce 30 septembre, le gouvernement kazakh a annoncé le lancement de l’Alem Crypto Fund, un fonds national d’investissement dans les actifs numériques, en partenariat avec Binance Kazakhstan. Premier actif acquis : du BNB, le token natif de Binance Smart Chain. Retour sur une initiative stratégique qui en dit long sur les ambitions crypto de ce pays d’Asie centrale.
Un fonds crypto national pour renforcer les réserves stratégiques
Dans une annonce officielle relayée par le site du gouvernement kazakh, l’Alem Crypto Fund a été présenté comme un fonds d’investissement public dédié aux actifs numériques, piloté par le Ministère de l’Intelligence Artificielle et du Développement Numérique. Sa gestion opérationnelle a été confiée à la Qazaqstan Venture Group, sous l’égide du centre financier international d’Astana (AIFC). La première acquisition réalisée par le fonds porte sur le BNB, token utilitaire de Binance utilisé pour les frais de transaction, la gouvernance et d’autres fonctions sur Binance Smart Chain.
L'annonce ne précise ni le montant de l'achat de BNB, ni les actifs qui pourraient être ajoutés ensuite au portefeuille. Cependant, le texte indique que l’objectif du fonds est clair : « faire des investissements à long terme dans les actifs numériques et constituer des réserves stratégiques ». Cette décision s’inscrit dans une dynamique plus large de coopération renforcée entre Binance et le gouvernement kazakh, amorcée dès 2022 avec la signature d’un protocole d'accord visant à construire un cadre réglementaire pour les actifs crypto.
CryptoCity, stablecoin KZTE, réserves numériques : le Kazakhstan accélère sa transition
Le lancement de l’Alem Crypto Fund ne constitue qu’un volet d’une stratégie beaucoup plus large de digitalisation monétaire. En mai 2025, le pays avait déjà dévoilé le projet CryptoCity, une zone pilote autorisant les paiements en cryptomonnaies. Ce fonds crypto intervient également quelques jours seulement après l’introduction d’un stablecoin adossé au tenge, le KZTE, émis sur le réseau Solana en partenariat avec Mastercard, Intebix et Eurasian Bank.
Cette orientation proactive répond aux directives du président Kassym-Jomart Tokaïev, qui a récemment réaffirmé son intention de créer une « véritable réserve stratégique de cryptomonnaies » et un « écosystème complet d’actifs numériques », avec une législation prévue avant 2026. En parallèle, la Banque nationale du Kazakhstan aurait envisagé un autre fonds crypto, financé cette fois-ci via les revenus du minage et des avoirs saisis — bien distinct du Alem Crypto Fund, mais révélateur d’une volonté d’institutionnalisation de la crypto au plus haut niveau.
À moyen terme, ces initiatives pourraient positionner le Kazakhstan comme l’un des premiers États non-occidentaux à intégrer les actifs numériques dans sa stratégie macroéconomique nationale. Le parallèle avec le Salvador, premier pays à avoir constitué des réserves de Bitcoin en 2021, ou avec le Bhoutan, la Brésil ou l’Indonésie, qui explorent des dispositifs similaires, souligne l’émergence d’un nouveau paradigme de souveraineté financière à l’ère crypto.