Les menaces pesant sur les investisseurs en crypto ne se limitent plus au cyberespace. Une vague d’attaques physiques visant à extorquer leurs avoirs numériques bouleverse les standards de sécurité. En réponse, plusieurs assureurs développent des polices d’assurance anti-enlèvement spécifiquement calibrées pour les détenteurs d'actifs crypto.

Montée en flèche des attaques physiques : Un nouveau visage du risque crypto

Depuis plusieurs mois, les cas de violence contre des figures de l’univers crypto se multiplient à travers le monde. En France, le 13 mai dernier, la famille de Pierre Noizat, fondateur de la plateforme Paymium, a échappé de peu à une tentative d’enlèvement. Quelques jours plus tard, le 27 mai, un ressortissant russe a été arrêté à Séoul après avoir tenté de dérober près de 730 000 dollars à des investisseurs sud-coréens dans le cadre d’une fausse transaction crypto.

Aux États-Unis, le cas d’un touriste italien torturé pendant plusieurs jours à Manhattan a choqué les participants de la Bitcoin Conference de Las Vegas. “Ils sont tendus”, a confié Rebecca Rubenfeld, directrice des opérations chez AnchorWatch, à propos des participants. Elle affirme que la peur de la violence “était un sujet dominant” lors des discussions.

Ces attaques ne sont pas nouvelles, mais leur intensité et leur fréquence interpellent. La structure même des cryptomonnaies alimente ces dérives. Sans autorité centrale, les comptes sont sous le contrôle exclusif de leurs détenteurs. Une fois les clés d’accès obtenues sous la contrainte, les fonds peuvent être transférés de manière irréversible, puis blanchis.

Les assureurs développent des polices adaptées aux nouveaux risques

Face à l’ampleur du phénomène, les assureurs spécialisés ne restent pas les bras croisés. Trois sociétés, dont AnchorWatch, Relm Insurance et Hylant Capital, travaillent activement à l’élaboration de contrats “kidnap and ransom” (K&R) dédiés aux investisseurs crypto. Ce type de couverture existe depuis longtemps pour les dirigeants d’entreprise ou les diplomates.

Cependant, son adaptation au secteur crypto nécessite une approche différente. Joseph Ziolkowski, PDG de Relm Insurance, souligne la complexité de la tarification. “Le calcul des primes dépendra fortement des mesures de sécurité physique et numérique du client”, a-t-il indiqué. Une protection 24h/24 par des agents de sécurité pourrait réduire significativement le coût de la couverture.

Dans les faits, ces nouvelles protections viennent compléter une montée en puissance d’autres dispositifs de sécurité. Le 18 mai, la société Infinite Risks International rapportait une hausse notable des demandes de gardes du corps et de services de protection personnelle émanant de figures influentes du secteur.

Vers une nouvelle norme sécuritaire pour les investisseurs crypto ?

L’essor des polices K&R dans l’univers des actifs numériques reflète une tendance plus large : la professionnalisation rapide de la gestion des risques dans le Web3. Pour les investisseurs fortement exposés, l’assurance devient un outil indispensable, au même titre que le cold storage ou la double authentification.

Toutefois, cette évolution soulève aussi des limites. Si l’assurance peut atténuer les conséquences d’un enlèvement, elle ne protège pas de la vulnérabilité intrinsèque à la crypto : l’irréversibilité des transactions. Une fois les fonds transférés sous contrainte, aucun recours n’est possible.

À mesure que le marché se structure, une question reste en suspens. Les assureurs pourront-ils vraiment suivre le rythme d’un secteur aussi rapide et imprévisible ? Une chose est sûre, les détenteurs de crypto ne peuvent plus ignorer la menace physique. Et le monde de la sécurité traditionnelle, lui, découvre à son tour les défis du Web3.