Alors que l’accès à la propriété reste un rêve lointain pour une large frange des jeunes Américains, une nouvelle initiative législative cherche à redéfinir les règles du jeu. La sénatrice républicaine du Wyoming, Cynthia Lummis, vient de proposer une loi qui pourrait intégrer les actifs crypto dans le processus d’évaluation des demandes de prêts hypothécaires. À l'heure où l'immobilier vacille et où les actifs numériques deviennent un refuge ou un levier d'investissement, cette proposition résonne comme un signal fort à destination des marchés financiers.

Une loi pour considérer les cryptos comme actifs dans les demandes de prêts

La sénatrice Cynthia Lummis a présenté une proposition de loi intitulée « 21st Century Mortgage Act », visant à entériner une directive émise en juin par la Federal Housing Finance Agency (FHFA). Cette directive, adressée aux géants de la titrisation hypothécaire Fannie Mae et Freddie Mac, leur demande de « considérer les cryptos comme un actif pour les prêts hypothécaires résidentiels individuels ». Dans sa déclaration, Lummis a justifié cette initiative par une volonté d’« embrasser une voie innovante vers l’accumulation de richesse, en tenant compte du nombre croissant de jeunes Américains détenant des actifs numériques ».

L’objectif est clair : permettre aux détenteurs de cryptos d’utiliser leurs avoirs comme garantie sans conversion préalable en monnaie fiduciaire. Lummis cite des données du Census Bureau indiquant que seulement 36 % des moins de 35 ans sont propriétaires de leur logement au premier trimestre 2025. La proposition entend donc offrir une voie d’accession à la propriété plus inclusive, en intégrant les nouvelles formes de richesse détenues par la génération numérique.

Une initiative controversée : scepticisme démocrate et risques systémiques

Mais cette ouverture au monde des cryptos ne fait pas l’unanimité. Plusieurs sénateurs démocrates ont exprimé de vives réserves face à la directive de la FHFA. Dans une lettre datée du 24 juillet, ils ont demandé à William Pulte, directeur de l’agence, de « pleinement évaluer les risques et bénéfices » liés à l’intégration des cryptos dans les demandes de prêts. Ils pointent notamment les dangers de la volatilité historique et du manque de liquidité de ces actifs.

En parallèle, la Chambre des représentants examine une proposition similaire portée par la républicaine Nancy Mace, baptisée « American Homeowner Crypto Modernization Act », déposée le 14 juillet. Celle-ci impose aux prêteurs hypothécaires de « prendre en compte la valeur des actifs numériques détenus par un emprunteur dans tout compte de courtage associé à une plateforme crypto ».

Cette proposition de loi marque une tentative claire de rapprocher finance traditionnelle et crypto-économie. Si elle venait à être adoptée, elle créerait un précédent inédit dans l’histoire du crédit immobilier américain. Reste à savoir si les institutions financières sont prêtes à intégrer des actifs aussi volatils dans leur gestion du risque. Dans tous les cas, ce débat éclaire une dynamique de fond : la volonté d’adapter les structures financières aux réalités économiques d’une génération dont les avoirs sont de plus en plus numériques.