Dans un virage stratégique aussi inattendu que significatif, OpenAI vient de réaffirmer son ancrage dans le modèle non lucratif, rompant brutalement avec ses ambitions de transformation en entreprise classique. L’annonce du 5 mai a fait l’effet d’un électrochoc dans l’écosystème technologique, notamment après une année marquée par des tentatives assumées de restructuration à but lucratif. Pourquoi ce revirement ? Et surtout, quelles répercussions potentielles pour l’avenir de l’intelligence artificielle à l’échelle mondiale ?
OpenAI reste sous gouvernance non lucrative
Dans un billet de blog publié le 5 mai 2025, OpenAI a confirmé l’abandon de ses plans de transformation en entité à but lucratif. L’organisation, fondée en 2015 comme organisme à but non lucratif, avait déjà mis en place une structure hybride en 2019 en créant une entité à but lucratif contrôlée par la fondation. Le dernier projet en date consistait à convertir cette unité en Public Benefit Corporation (PBC), une société commerciale soumise à une obligation légale de poursuivre un objectif d’intérêt général, tout en restant sous la coupe de l’organisation mère.
Cette annonce contredit de précédentes orientations prises en 2024, où OpenAI justifiait la nécessité d’un modèle capitaliste pour attirer des capitaux massifs. À l’époque, l’organisation soutenait que le développement de modèles d’IA avancés nécessitait des investissements de « centaines de milliards de dollars, voire potentiellement des milliers de milliards », selon les mots de Sam Altman dans une lettre adressée aux employés. Pourtant, le patron de l’entreprise affirme désormais que ce retour aux racines non lucratives n’entravera pas la capacité d’OpenAI à lever des fonds.
Conflits internes, pression médiatique et ambitions contrariées
La décision de rester non lucratif intervient également dans un contexte particulièrement tendu, marqué par des litiges internes et des polémiques publiques dans le secteur de l’intelligence artificielle. En 2024, Elon Musk, cofondateur d’OpenAI, avait engagé des poursuites judiciaires contre Sam Altman, l’accusant d’avoir « manipulé Musk pour co-fonder un projet soi-disant non lucratif tout en préparant secrètement une conversion vers un modèle à but lucratif ».
Parallèlement à ces tensions, les ambitions économiques d’OpenAI restent colossales. Selon Bloomberg, la firme d’intelligence artificielle prévoit de tripler ses revenus en 2025 pour atteindre 12,7 milliards de dollars, avec une projection de 29,4 milliards de dollars en 2026. Elle aurait également levé 40 milliards de dollars auprès de Softbank à une valorisation faramineuse de 300 milliards de dollars. Cela laisse présager que la structure hybride actuelle reste extrêmement attractive pour les investisseurs, même sans conversion en entreprise classique.
La décision d’OpenAI de maintenir son statut non lucratif pourrait calmer les ardeurs de ses critiques, tout en lui permettant de conserver une certaine légitimité morale dans un secteur de plus en plus surveillé. Mais la question reste entière : comment conjuguer levées de fonds colossales, ambitions dans l’intelligence artificielle et mission d’intérêt général dans un cadre non lucratif ? Le choix de la PBC contrôlée par l’entité mère semble être un compromis habile, mais fragile, à surveiller de très près.