Les parlementaires américains accentuent leur intérêt pour le bitcoin. Ce mardi, ils rencontreront 18 dirigeants du secteur afin d’examiner le projet de réserve stratégique, une initiative qui pourrait redessiner la politique monétaire des États-Unis.
Un projet de loi qui veut faire entrer le bitcoin dans les coffres de l’État
Le BITCOIN Act, introduit au Sénat en mars 2024 par la sénatrice républicaine Cynthia Lummis, prévoit l’acquisition par le gouvernement américain d’une réserve de 1 million de bitcoins sur cinq ans. Cette proposition, encore largement méconnue du grand public, vise à positionner le bitcoin comme un actif stratégique, à l’image des réserves d’or détenues par la Réserve fédérale.
Dans cette optique, une réunion décisive doit avoir lieu entre plusieurs membres du Congrès et 18 dirigeants du secteur crypto, parmi lesquels Michael Saylor (MicroStrategy), Tom Lee (Fundstrat / BitMine), Fred Thiel (Marathon Digital), ou encore des représentants de eToro et d’entreprises de minage.
Les discussions porteront notamment sur les mécanismes de financement. Les porteurs du projet assurent qu’il sera neutre sur le plan budgétaire, c’est-à-dire qu’il n’impliquera ni déficit supplémentaire, ni augmentation d’impôts. Parmi les pistes explorées : la réévaluation des certificats d’or détenus par le Trésor, ou encore l’utilisation des revenus issus des droits de douane.
Cette orientation vers un financement innovant, sans recourir à la dette publique, est perçue comme un gage de sérieux pour convaincre les parlementaires encore réticents.
Ce positionnement stratégique de Bitcoin s’inscrit dans une dynamique plus large observée sur les marchés. Malgré l’essor d’Ethereum et les milliards investis dans ses ETF — plus de 4 milliards de dollars en août seulement — la dominance de bitcoin reste intacte. Comme le souligne
Ryan Lee, analyste chez Bitget, la paire ETH/BTC demeure sous 0,05 depuis plus d’un an, ce qui confirme que Bitcoin reste l’actif refuge privilégié des investisseurs conservateurs dans un climat macroéconomique incertain.
Entre obstacles politiques et enjeux géopolitiques
L’initiative ne fait toutefois pas l’unanimité au sein du Congrès. Six mois après son dépôt, le BITCOIN Act peine encore à franchir les premières étapes législatives. Les critiques portent principalement sur la volatilité du Bitcoin, l’incertitude réglementaire persistante, et les risques géopolitiques d’un tel engagement à l’échelle étatique.
En réponse, les promoteurs de la réserve BTC défendent un argumentaire stratégique : le bitcoin représenterait un outil de souveraineté numérique, potentiellement utile en cas de crise monétaire ou de tensions internationales. Dans un contexte où plusieurs puissances explorent activement les monnaies numériques de banque centrale (MNBC), l’idée d’une réserve nationale en cryptoactifs s’inscrit dans une logique de diversification monétaire.
La présence de grandes entreprises de minage et de capital-risque à la table des négociations souligne également l’implication croissante du secteur privé. Ces acteurs cherchent à consolider leur position dans une industrie encore jeune mais en pleine maturation, tout en influençant la régulation à venir.
En toile de fond, les perspectives macroéconomiques pourraient également renforcer la légitimité d’une réserve stratégique en Bitcoin. La Fed est attendue pour un assouplissement monétaire lors de sa réunion du 17 septembre, avec une baisse des taux de 25 points de base anticipée. Ce scénario favoriserait une hausse de la liquidité et soutiendrait les actifs à risque.
Ryan Lee estime que cela pourrait propulser le Bitcoin dans une fourchette de 150 000 à 200 000 dollars d’ici la fin de l’année, renforçant ainsi sa fonction de réserve de valeur. Dans un marché en pleine maturation, Bitcoin continue de jouer un rôle d’ancrage pour l’ensemble de l’écosystème crypto.
L’idée d’un État américain détenteur d’un million de bitcoins relève encore de la projection politique. Mais la dynamique enclenchée autour du BITCOIN Act révèle un changement profond de perception : le Bitcoin n’est plus simplement un actif spéculatif, il devient un outil de souveraineté monétaire pour certains acteurs de Washington. Reste à voir si cette vision deviendra loi… ou restera une stratégie de campagne.