Nasdaq envisage d’intégrer la technologie blockchain à son infrastructure existante. Une proposition de modification réglementaire déposée auprès de la SEC pourrait ouvrir la voie à la négociation de titres tokenisés dès 2026.

Intégrer la tokenisation sans perturber les mécanismes existants

Le 8 septembre 2025, Nasdaq a soumis à la Securities and Exchange Commission (SEC) une demande visant à autoriser la négociation de titres sous format tokenisé sur son marché principal. Concrètement, il s’agirait de permettre à des actions cotées ou des produits négociés en bourse (ETP) d’exister simultanément sous deux formes : traditionnelle (par inscription électronique dans un registre central) et tokenisée (sous forme de jetons numériques, généralement sur une blockchain privée ou permissionnée).

Dans le cadre de cette proposition, les titres tokenisés seraient strictement équivalents à leurs versions classiques, à condition que l’ensemble des droits matériels associés soit intégralement préservé. Si tel n’était pas le cas, ils seraient alors considérés comme de nouveaux instruments financiers distincts.

Afin de garantir la stabilité du système, Nasdaq prévoit de conserver une structure identique pour les deux types de titres : même carnet d’ordres, mêmes règles de priorité, de surveillance, et de traitement des ordres. L’ensemble des opérations, y compris le règlement et la compensation, continuerait de s’appuyer sur les services de la Depository Trust Company (DTC), qui joue un rôle central dans le fonctionnement des marchés américains.

Un cadre réglementaire plus souple et une mise en œuvre envisagée pour 2026

Cette démarche s’inscrit dans un contexte politique et réglementaire plus favorable à l’innovation financière aux États-Unis. L’administration actuelle a amorcé un tournant pro-blockchain, accompagné d’un assouplissement des positions historiques de la SEC sur les actifs numériques.

Si la procédure suit son calendrier, les premiers titres tokenisés pourraient être admis à la négociation dès la fin du troisième trimestre 2026. Le succès de cette initiative repose en grande partie sur la capacité de la DTC à adapter ses services pour prendre en charge ce nouveau type de titres sans perturber le fonctionnement global du marché.

Selon Vugar Usi Zade, COO de Bitget, cette proposition marque potentiellement un tournant pour la finance traditionnelle. En intégrant des actions tokenisées dans les carnets d’ordres classiques, Nasdaq pourrait permettre un accès étendu aux marchés, notamment via la négociation 24h/24 et la propriété fractionnée, ce qui renforcerait la participation mondiale, y compris chez les investisseurs individuels.

Opportunités d’efficacité et vigilance réglementaire

La tokenisation est perçue par de nombreux acteurs comme un levier d’efficacité opérationnelle. Elle permettrait notamment de réduire les délais de règlement, d’automatiser certaines tâches, et d’améliorer la traçabilité des transactions. Des institutions majeures telles que Coinbase, Citi ou Bank of America explorent également ce type d’innovation, ce qui montre une dynamique croissante en faveur de l’intégration de la blockchain dans les marchés financiers traditionnels.

Tal Cohen, président de Nasdaq, souligne que cette proposition vise à allier les bénéfices de la technologie décentralisée à l’encadrement rigoureux des marchés réglementés. L’idée est d’apporter de l’innovation sans compromettre les piliers fondamentaux de la finance : transparence, liquidité et sécurité.

Néanmoins, cette transition pose aussi des défis. Le Forum économique mondial a mis en évidence des risques tels que le manque de liquidité sur le marché secondaire ou l’absence de standards globaux en matière de tokenisation. La SEC, de son côté, rappelle que la nature « tokenisée » d’un actif ne saurait le soustraire aux règles traditionnelles applicables aux valeurs mobilières.

Vugar Usi Zade ajoute que cette évolution incarne l’émergence de modèles hybrides d’échanges, combinant la fiabilité des plateformes centralisées et l’efficacité des technologies blockchain. Pour les bourses traditionnelles comme Nasdaq, cette adoption permet de renforcer leur compétitivité tout en incitant les acteurs crypto-natifs à progresser sur des sujets comme la conformité et l’interopérabilité.

Vers une coexistence harmonieuse entre innovation et régulation

Avec cette proposition, Nasdaq ambitionne d’initier une nouvelle ère pour les marchés financiers, où technologie blockchain et infrastructure classique coexisteraient sans rupture. Il ne s’agit pas de transformer radicalement le système existant, mais d’introduire progressivement des outils plus souples, plus rapides et potentiellement moins coûteux.

Si le projet est approuvé, il pourrait servir de modèle pour d’autres bourses dans le monde et accélérer la normalisation des titres numériques dans les marchés réglementés. Le défi consistera à démontrer que ces innovations peuvent s’intégrer sans fragiliser l’écosystème actuel, tout en créant de nouvelles opportunités pour les émetteurs et les investisseurs.

Pour Usi Zade, cette convergence annonce un système financier plus inclusif, plus fluide et plus robuste — à condition que les régulateurs sachent accompagner l’innovation à un rythme soutenu.