Le récent décret signé par Donald Trump interdisant les monnaies numériques de banque centrale (CBDC) suscite de vives réactions. Alors que les États-Unis tournent le dos à ces projets, d’autres régions, comme l’Union européenne, continuent de miser sur leur potentiel stratégique. Cette décision pourrait remodeler les dynamiques financières internationales.

Un décret américain qui rebat les cartes des CBDC

Le 23 janvier, l’ancien président Donald Trump a signé un décret interdisant formellement toute création, émission ou utilisation de monnaies numériques de banque centrale (CBDC) aux États-Unis. Cette décision, saluée par une partie de la communauté crypto, soulève de nombreuses questions quant à son impact sur les initiatives mondiales liées aux CBDC.

Pour Yifan He, fondateur de Red Date Technology, cette interdiction pourrait avoir des répercussions importantes. « Cette décision affectera tous les projets de CBDC au détail pour les quatre prochaines années »; a-t-il déclaré. Toutefois, il estime également que des obstacles techniques rendent improbable la mise en œuvre concrète de telles initiatives d’ici dix ans.

Il est essentiel de distinguer deux types de CBDC. Les versions dites « au détail » visent le grand public, tandis que les CBDC « de gros » ou transfrontalières s’adressent aux banques et institutions financières pour simplifier les paiements interbancaires. Le décret de Trump pourrait davantage freiner les projets au détail, déjà ralentis par des défis technologiques complexes.

À lire également : Crypto : Voici pourquoi les stablecoins deviennent l’alternative privilégiée aux CBDC aux États-Unis

Une opportunité pour les CBDC transfrontalières et les alternatives

Alors que les États-Unis prennent leurs distances, l’intérêt pour les CBDC de gros s’intensifie, notamment dans des régions cherchant à réduire leur dépendance au système financier américain. Selon Lambis Dionysopoulos, chercheur à l'Observatoire européen de la Blockchain, ces systèmes sont désormais perçus comme des alternatives crédibles à l'hégémonie financière américaine.

Des pays comme la Russie, confrontés à la domination des systèmes de paiement américains, considèrent les CBDC transfrontalières comme un levier pour éviter une dépendance stratégique. En Europe, Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), a souligné que l’euro numérique est essentiel pour l'autonomie et la sécurité économique du continent. 

Ces développements, associés à l'approche protectionniste de l’administration Trump, pourraient encourager des alliances internationales pour des projets de CBDC transfrontalières. Dionysopoulos évoque la possibilité d’un renforcement des efforts dans les pays où les relations avec les États-Unis sont tendues. De son côté, l’Union européenne pourrait accélérer ses travaux sur l’euro numérique pour affirmer son indépendance monétaire et réduire sa dépendance aux infrastructures non européennes.

En définitive, le bannissement des CBDC par les États-Unis marque un tournant majeur pour l’avenir de ces monnaies numériques. Si cette décision freine les projets de détail, elle pourrait paradoxalement stimuler l’adoption des CBDC de gros dans d’autres régions du monde. Entre défis techniques et opportunités stratégiques, l’avenir des CBDC reste incertain. Toutefois, des acteurs clés comme l’Union européenne semblent déterminés à poursuivre leurs initiatives. Cette situation illustre une nouvelle fois la complexité croissante des relations économiques internationales.