Présentées comme l’alternative des gouvernements face à l’adoption croissante de cryptomonnaies, les monnaies numériques de banques centrales (CBDC) peinent à faire l’unanimité. Ces dernières suscitent notamment d’énormes craintes quant à la protection de la vie privée des utilisateurs. Présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde a essayé tant bien que mal de rassurer les législateurs européens sur la question.

L’euro numérique laissera des traces à l’image des cryptomonnaies sur la blockchain

Directrice du programme pour l'euro numérique à la BCE, Evelien Witlox déclarait en avril dernier que l’institution ne s’intéresse pas aux données personnelles des utilisateurs de la CBDC. Cinq mois plus tard, ces propos ne semblent pas avoir apaisé les craintes des législateurs européens qui l’ont d’ailleurs fait savoir lundi dernier à Christine Lagarde.

La Présidente de la BCE a ainsi été interrogée sur la différence entre la notion de la vie privée et celle de l’anonymat dans le cadre de l’utilisation de la CBDC. Député centriste allemand, Nicola Beer s’est d’ailleurs montré particulièrement incisif en demandant :

« Comment vérifier toutes les préoccupations majeures en matière de protection de la vie privée si l'on demande des limites de transaction et de détention, ainsi que l'identification, avec pour conséquence une traçabilité totale ? »

Tout en assurant que la protection de la vie privée des utilisateurs de l’euro numérique reste la priorité de la BCE, Christine Lagarde a reconnu qu’il n’offrira pas un anonymat total. « Nous travaillons à protéger la vie privée, mais puisque l'argent numérique laisse une trace sur la blockchain, cela ne sera pas entièrement anonyme comme c'est le cas avec un billet de banque. », a-t-elle déclaré.

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La BCE ne deviendra pas une sorte de Big Brother

La présidente de la BCE a ensuite livré une explication sur le système d’émission et de distribution de l’euro numérique, mettant notamment en avant le rôle réservé aux banques commerciales. Elle a ainsi précisé que ce sont ces dernières qui auront accès aux données des utilisateurs, comme c’est déjà le cas avec les billets de banque. « Les données ne seront pas à la disposition de la BCE, ce ne sera pas une BCE Big Brother qui va se pencher sur le détail des transactions. », a-t-elle assuré.

En ce qui concerne la poursuite du projet pilote de l’euro numérique, Christine Lagarde a fait savoir que la BCE devrait prendre des décisions importantes à ce sujet dans les prochains jours. « Ce n'est que dans le courant du mois d'octobre que le conseil des gouverneurs [de la BCE] décidera si nous pouvons aller plus loin dans le pilotage du projet. Le projet pilote nous prendra probablement encore deux ans, au moins, avant que nous ayons le dernier mot. », a-t-elle conclu.

L’euro numérique offrira donc à ses utilisateurs une protection de la vie privée sans être totalement anonyme à en croire la présidente de la BCE. Difficile de savoir si cela suffira à convaincre les membres du Parlement européen d’approuver le projet de loi sur la CBDC. Stefan Berger aura justement la lourde mission de s’en assurer, lui qui a su brillamment faire passer la réglementation MiCA sur les cryptomonnaies.