La transformation du bitcoin (BTC) en actif déflationniste ne relève plus seulement de la théorie économique. Elle trouve désormais un levier concret dans la stratégie d’accumulation intensive menée par l’entreprise Strategy. En absorbant quotidiennement plus de BTC que ce que les mineurs produisent, cette société provoque une contraction mécanique de l’offre, redessinant en profondeur la dynamique des marchés.

Strategy, un acteur clé à l'origine d'une raréfaction artificielle du bitcoin

Depuis plusieurs années, Strategy s’impose comme l’un des acteurs majeurs du marché du bitcoin. L’entreprise détient actuellement 555 000 BTC, soit environ 2,8 % de l’offre totale en circulation. Adam Livingston, auteur de The Bitcoin Age and The Great Harvest, estime que Strategy exerce une pression équivalente à un halving artificiel en absorbant bien plus que la production des mineurs grâce à une forte demande.

D’après lui, les mineurs produisent collectivement environ 450 BTC par jour, alors que Strategy en accumule en moyenne 2 087 quotidiennement, soit plus de quatre fois ce volume. Dans un message publié le 10 mai sur X, JKi Young Ju, PDG de CryptoQuant, souligne que les 555 000 BTC détenus par Strategy sont considérés comme illiquides, c’est-à-dire non destinés à être revendus à court terme.

Cette stratégie réduit structurellement l’offre disponible sur le marché. Selon Ju, cette situation engendre déjà un taux de déflation annuel estimé à -2,23 %, un chiffre qui pourrait encore augmenter si d’autres institutions adoptent une politique d’accumulation similaire. Michael Saylor, cofondateur de Strategy et fervent défenseur du bitcoin, affirme que plus de 13 000 institutions détiennent des actions de sa société. Ce mécanisme d’intermédiation renforce l’exposition de la finance traditionnelle à l’actif numérique.

Bitcoin : Les géants institutionnels à la porte du marché

En dehors de Strategy, d'autres acteurs comme les hedge funds, les fonds de pension et les gestionnaires d’actifs s’intéressent eux aussi au bitcoin, souvent pour diversifier leurs portefeuilles ou se prémunir contre l’inflation monétaire. Leur implication pourrait marquer un tournant majeur, à la fois par l’ampleur des capitaux engagés et par le signal envoyé aux marchés.

Cependant, l’entrée des fonds souverains — considérés comme les poids lourds de l’investissement institutionnel — reste conditionnée à l’établissement de règles claires aux États-Unis. D’après Anthony Scaramucci, fondateur de SkyBridge, ces institutions n’interviendront massivement que lorsque le cadre réglementaire américain sera stabilisé. « Une fois une régulation claire en place, les achats massifs par les fonds souverains pourraient s’enclencher », a-t-il déclaré.

En orchestrant une rareté contrôlée à l’aide d’outils financiers classiques, Strategy agit comme un acteur systémique dans l’évolution du bitcoin. Son modèle pourrait inspirer d’autres entreprises, accélérant ainsi l’intégration du BTC dans les portefeuilles institutionnels à l’échelle mondiale. L’équilibre du marché s’en trouve déjà transformé, et les prochaines phases d’adoption pourraient franchir un nouveau cap dès que les régulateurs lèveront les dernières incertitudes.