Le président polonais Karol Nawrocki a refusé de signer un texte qui imposait une réglementation particulièrement stricte au marché des actifs numériques. Ce geste a été salué par la communauté crypto, mais a suscité de vives critiques au sein du gouvernement.
Selon un communiqué publié lundi par son bureau, Nawrocki a mis son veto à la Crypto-Asset Market Act , considérant que certaines dispositions « menacent réellement les libertés des Polonais, leurs biens et la stabilité de l’État ».
Présenté en juin, le texte avait déjà été critiqué par plusieurs défenseurs du secteur, dont le politicien Tomasz Mentzen. Celui-ci avait anticipé le refus du président, même après le feu vert du Parlement.
Si les acteurs crypto ont perçu ce veto comme une victoire pour le marché, plusieurs responsables gouvernementaux l’ont dénoncé, accusant le président d’avoir « choisi le chaos » et d’en porter désormais l’entière responsabilité.
Pourquoi le président a opposé son veto
L’un des principaux motifs évoqués concerne une disposition permettant aux autorités de bloquer facilement les sites opérant dans le secteur crypto.
« Les lois sur le blocage de domaines manquent de transparence et peuvent conduire à des abus », a déclaré la présidence dans un communiqué officiel.
La présidence a également souligné la longueur du texte, largement critiquée. Selon elle, sa complexité nuit à la transparence et conduirait à une « sur-réglementation », surtout en comparaison avec des cadres plus simples adoptés en Tchéquie, en Slovaquie ou en Hongrie.
« La sur-réglementation pousse les entreprises à s’installer en Tchéquie, en Lituanie ou à Malte, au lieu de créer des conditions favorables pour qu’elles opèrent et paient leurs impôts en Pologne », a déclaré le président.
Nawrocki a également mis en avant le niveau jugé excessif des frais de supervision, susceptibles de dissuader les startups et de favoriser les grandes entreprises étrangères ou les banques.
« C’est un contresens total, qui étouffe la concurrence et constitue une menace sérieuse pour l’innovation », a-t-il ajouté.
Les critiques s’enchaînent : « Le président a choisi le chaos »
Le veto de Nawrocki a déclenché un fort retour de flamme parmi les hauts responsables polonais, notamment le ministre des Finances Andrzej Domański et le vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères Radosław Sikorski.
Sur X, Domański a alerté que « déjà aujourd’hui, 20 % des clients perdent leur argent à cause des abus dans ce marché », accusant le président d’avoir « choisi le chaos » et affirmant qu’il devra assumer toutes les conséquences.
Sikorski a repris les mêmes critiques, estimant que ce projet de loi devait justement encadrer le marché crypto. « Lorsque la bulle éclatera et que des milliers de Polonais perdront leurs économies, ils sauront au moins qui remercier », a-t-il écrit sur X.
Des défenseurs du secteur, dont l’économiste polonais Krzysztof Piech, ont répliqué immédiatement, estimant que le président ne peut pas être tenu responsable de l’inaction des autorités face aux arnaqueurs.
Il a aussi rappelé que la régulation européenne MiCA doit entrer pleinement en vigueur le 1er juillet 2026, offrant un cadre de protection des investisseurs dans l’ensemble de l’UE.