Alors que les marchés scrutent chaque mot de la Réserve fédérale, le secteur des cryptomonnaies tente de se stabiliser. Malgré un léger rebond du bitcoin, la prudence reste de mise. En réalité, ni les signaux macroéconomiques ni les dynamiques internes n’offrent de clarté. L’incertitude monétaire américaine agit comme un couvercle sur l’appétit des investisseurs.
Une reprise fragile freinée par l’indécision monétaire
Après une série de ventes marquées, le bitcoin est reparti à la hausse, atteignant 92 600 dollars, soit une progression de 2,7 %. Toutefois, cette hausse ne suffit pas à franchir les seuils structurels critiques observés sur les marchés. La tendance reste suspendue à l’évolution des décisions de politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed), dont les dernières minutes révèlent une volonté de ne procéder à des baisses de taux qu’après confirmation de la trajectoire économique.
Cette prudence affichée par la Fed a été contrebalancée à court terme par les résultats solides de Nvidia, qui ont momentanément relancé l’appétit pour le risque, notamment sur les marchés numériques. Mais sur le terrain, les données on-chain témoignent d’un stress profond. Le bitcoin reste sous le seuil du quantile de coût moyen de 0,75, un indicateur technique considéré comme essentiel pour éviter une reprise d’un marché baissier durable.
Côté produits d’investissement, les flux sont contrastés. Les ETF Bitcoin ont connu des entrées de 75 millions de dollars, tandis que les produits en ether continuent d’enregistrer des retraits pour le septième jour consécutif, atteignant 37 millions de dollars de sorties. Seule la blockchain Solana tire son épingle du jeu avec des flux entrants de 55 millions de dollars, illustrant une confiance relative de certains investisseurs dans des projets alternatifs au duopole BTC/ETH.
Entre pressions structurelles et signaux inversés : Quel avenir pour les cryptos ?
Les marchés crypto traversent une phase ambivalente. Si certains indicateurs comme l’accumulation des “whales” (grands porteurs) peuvent signaler un retournement en préparation, la dynamique reste fragile tant que le sentiment général reste dominé par la panique des investisseurs particuliers. Ce comportement — ventes massives par les petits porteurs pendant que les baleines achètent — est souvent un signal classique de bas de cycle, mais il manque encore de confirmations techniques.
Au-delà des dynamiques de prix, les transformations structurelles du secteur inquiètent. Le marché des stablecoins, estimé à plus de 300 milliards de dollars, soulève désormais des enjeux systémiques. Ce flux massif de capitaux vers des actifs crypto-stables menace potentiellement le modèle traditionnel des prêts bancaires, en réduisant la base de dépôts des banques.
Dans ce contexte incertain, Gracy Chen, CEO de Bitget, observe que les actifs numériques réagissent désormais aux mêmes facteurs macroéconomiques que les marchés traditionnels, un signe de maturité croissante de l’industrie crypto. Elle note que la baisse des anticipations de réduction des taux pour décembre, en raison notamment du report de données clés comme le rapport sur l’emploi d’octobre, reflète une hausse de l’incertitude économique, mais aussi l’intégration profonde des cryptos dans la finance classique.
À court terme, une telle configuration pourrait générer des sorties temporaires des ETF spot Bitcoin et Ether, renforçant la volatilité, mais créant aussi des opportunités pour les traders actifs. Elle précise que ce réajustement macroéconomique n’est pas un signe de déclin, mais plutôt une phase de recalibrage saine, qui élimine les excès spéculatifs et prépare le terrain à des niveaux de soutien plus solides.
Selon Chen, les perspectives de reprise dépendent fortement de la capacité des acteurs à s’adapter aux nouvelles conditions. Une surveillance attentive des prochains procès-verbaux de la Fed, des chiffres de l’emploi révisés, des flux d’ETF en temps réel et des réserves de stablecoins permettra aux traders d’anticiper les retournements. À mesure que la réglementation s’éclaircit et que les institutions renforcent leur présence, ces changements pourraient catalyser la prochaine phase de croissance du secteur.