Dans un climat où la régulation des actifs crypto reste une ligne de fracture entre innovation et surveillance, chaque clarification réglementaire peut rebattre les cartes pour les acteurs bancaires et les investisseurs. L’annonce récente de l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), le principal régulateur bancaire aux États-Unis, marque une nouvelle étape : les banques américaines autorisées pourront désormais détenir certaines cryptomonnaies pour régler les frais de réseau. Cette mesure, qui s’inscrit dans le sillage du GENIUS Act, ravive les discussions sur le rôle des établissements bancaires dans l’écosystème crypto.

Une autorisation qui ne s’étend pas à tous les usages crypto

Dans une note officielle publiée mardi, l’OCC a confirmé que les banques nationales américaines peuvent désormais détenir des cryptos sur leur bilan, à condition que cela serve à régler des frais de réseau dans le cadre d’activités jugées permises. Selon le régulateur, une banque autorisée peut détenir des montants de cryptos en tant que principal, dans la mesure où cela est nécessaire pour tester des plateformes liées aux cryptos autorisées. Cette autorisation ne s’étend pas à tous les usages, mais reste strictement encadrée par les lois en vigueur.

Le régulateur a insisté sur le fait que ces opérations doivent être menées de manière sûre et saine, conformément aux législations applicables. Ce positionnement vient en complément d’une lettre de mai dernier qui autorisait déjà les banques à traiter des actifs crypto pour leurs clients, notamment via des prestataires tiers. Il s’agit ici d’une clarification plus ciblée sur les usages internes, et non de la conservation pour le compte de clients.

GENIUS Act, stablecoins et stratégie réglementaire en mutation

Cette nouvelle prise de position de l’OCC s’inscrit directement dans la continuité du GENIUS Act, une loi sur les stablecoins signée en juillet 2025. Ce texte encadre l’émission et l’utilisation des stablecoins de paiement aux États-Unis. Selon la lettre de l’OCC, les transactions utilisant des stablecoins dans les banques nationales exigeront probablement des frais de réseau. C’est ce besoin opérationnel qui justifie que les banques puissent régler ces frais directement via les actifs crypto qu’elles détiennent ou par le biais d’agents.

Toutefois, la mise en œuvre complète du GENIUS Act est encore lointaine : le Trésor américain et la Réserve fédérale doivent encore définir les règlements applicables. Parallèlement, le Sénat poursuit les négociations autour d’un texte structurant pour l’ensemble du marché des actifs numériques, considéré comme la législation crypto la plus ambitieuse à ce jour aux États-Unis.

Au-delà de la clarification réglementaire, cette évolution traduit une inflexion stratégique. Elle illustre la volonté des autorités américaines de baliser l’intégration des cryptos dans le système bancaire traditionnel, tout en gardant la main sur les conditions d’usage. À court terme, cela pourrait ouvrir la voie à des expérimentations limitées, mais à long terme, le signal est clair : les banques pourraient devenir des opérateurs techniques à part entière de l'infrastructure crypto.