L’étau réglementaire pourrait bientôt desserrer son emprise sur les entreprises crypto aux États-Unis. Dans une déclaration remarquée, le responsable de l’OCC, Jonathan Gould, a affirmé sa volonté d’interdire toute discrimination bancaire envers les acteurs crypto opérant dans la légalité. Un tournant décisif, qui pourrait redéfinir l’accès aux services financiers pour l’industrie blockchain.

La fin annoncée du “debanking” pour les entreprises crypto légales

Le comptroller intérimaire de l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), Jonathan Gould, a clairement exposé son objectif : supprimer les pratiques discriminatoires exercées par certaines banques envers les entreprises de cryptomonnaies en conformité réglementaire. À ses yeux, les institutions financières ne peuvent continuer à appliquer un “système à deux vitesses”, où la simple nature crypto d’un client justifie une exclusion bancaire.

« Il n’y a aucune raison pour que des entités légalement conformes soient privées de services bancaires de base », a martelé Gould. L’OCC veut garantir que les décisions d’ouverture de compte soient fondées sur le profil de risque réel, non sur des préjugés liés à une industrie.

Ryan Lee, analyste en chef chez Bitget, voit dans cette reconnaissance du problème une avancée majeure. « Jonathan Gould admet que le ‘crypto debanking’ est réel, c’est un moment charnière qui valide les obstacles rencontrés depuis des années par les entreprises pour accéder aux services bancaires » a-t-il indiqué.

Cela ne signifie pas pour autant un blanc-seing : les sociétés crypto devront démontrer qu’elles possèdent les infrastructures de sécurité adéquates, qu’elles ont intégré des mécanismes robustes de gestion du risque, et qu’elles assurent une gouvernance financière solide. L’accès aux services bancaires reste conditionné à une transparence totale et à des pratiques rigoureuses.

Le nouveau cadre de l’OCC s’accompagne d’une clarification sur ce que les banques peuvent ou non faire avec les actifs numériques. Selon Lee, ces directives « ouvrent la voie à un traitement plus équitable des entreprises crypto » en réduisant les restrictions arbitraires et en offrant un cadre plus stable.

Enjeux, limites et perspectives

Si cette annonce marque un tournant symbolique fort, sa mise en œuvre pourrait rencontrer des obstacles concrets. De nombreuses banques américaines demeurent frileuses face à l’univers crypto, encore associé à la volatilité, aux risques de blanchiment et à un encadrement réglementaire en mutation permanente. À cela s’ajoute une fragmentation des interprétations réglementaires selon les juridictions et les agents de supervision.

La déclaration de l’OCC s’inscrit dans un contexte politique très explicite. L’administration Trump, revenue sur le devant de la scène électorale, a fait de la crypto un axe stratégique, avec pour ambition de faire des États-Unis une place forte de l’innovation blockchain. La nomination de Gould et ses déclarations s’alignent sur cette dynamique : création de lois spécifiques sur les stablecoins, retour de discussions sur une CBDC version privée, et critiques ouvertes envers les organismes régulateurs jugés trop restrictifs.

Dans ce sens, les ajustements apportés à l’application du GENIUS Act, qui facilitent l’obtention de licences bancaires pour les émetteurs de stablecoins, viennent compléter les efforts de l’OCC. Ryan Lee y voit un « dégel réglementaire réel et une volonté d’intégrer les actifs numériques dans la finance traditionnelle. »

Pour les entreprises crypto, ce changement de cap pourrait marquer le début d’un accès plus fluide aux infrastructures bancaires. Moins de frictions avec les banques, plus de confiance de la part des investisseurs, et une meilleure gestion opérationnelle sont des leviers non négligeables pour soutenir la croissance. Toutefois, cela impose aussi un devoir accru de conformité, notamment en matière de KYC, d’audits et de transparence financière.

Lee anticipe un effet de levier plus large. « Des règles plus claires réduisent le risque perçu par les acteurs traditionnels, ce qui pourrait accélérer l’entrée de fonds spéculatifs, dépositaires et autres investisseurs institutionnels » a-t-il martelé. Ce mouvement pourrait renforcer la liquidité, stimuler la participation du marché et instaurer une dynamique de confiance durable.

Reste à voir si l’OCC parviendra à imposer sa ligne directrice aux banques, qui disposent d’une marge d’appréciation importante dans l’analyse des risques. Les mois à venir seront décisifs pour juger de l’effectivité réelle de cette promesse de non-discrimination.

L’annonce de Jonathan Gould sonne comme un appel à la normalisation du secteur crypto au sein du système bancaire traditionnel. Reste à savoir si les intentions affichées se traduiront par des mécanismes d’exécution concrets et efficaces. L’enjeu est de taille : il s’agit de faire tomber les dernières barrières entre finance traditionnelle et innovation décentralisée.