L’or n’a jamais autant pesé dans les coffres des banques centrales depuis trente ans. Selon la Deutsche Bank, cette frénésie d’achats pourrait tracer la voie au bitcoin, de plus en plus perçu comme un futur actif de réserve. Le parallèle entre ces deux valeurs refuges attire désormais l’attention du monde financier.
L’or retrouve son trône dans les réserves mondiales
D’après un rapport de la Deutsche Bank, la part de l’or dans les réserves officielles mondiales a atteint 24 % au deuxième trimestre de l’année, un niveau inédit depuis les années 1990. Les stratèges de la banque soulignent que la demande officielle d’or est aujourd’hui deux fois supérieure à la moyenne observée entre 2011 et 2021. Cette accumulation rappelle les comportements du siècle dernier, quand l’or dominait la finance mondiale.
La Deutsche Bank explique que le métal jaune vient seulement de dépasser ses records historiques ajustés à l’inflation, établis en 1980. Ce retard s’explique, selon la banque, par des décennies de ventes institutionnelles et la fin de son rôle monétaire officiel en 1979, lorsque le FMI a interdit aux États membres d’arrimer leurs monnaies à l’or, huit ans après la chute du système de Bretton Woods.
Les stratèges estiment que cette « redécouverte » de l’or traduit un besoin accru de sécurité dans un contexte d’incertitude monétaire mondiale.
Bitcoin sur les traces de l’or
Dans un rapport intitulé “Gold’s reign, Bitcoin’s rise”, la macro-stratégiste Marion Laboure de la Deutsche Bank établit de forts parallèles entre les deux actifs. Elle note que leurs trajectoires de performance sont étonnamment similaires depuis leurs débuts respectifs.
« Les deux ont connu des périodes de forte volatilité et de sous-performance », écrit-elle, ajoutant que leurs corrélations faibles avec les actifs traditionnels offrent des avantages de diversification.
Laboure reconnaît toutefois plusieurs limites à bitcoin, évoquant notamment sa volatilité historique, son absence de garantie tangible et des risques de cybersécurité. Mais elle souligne aussi que cette volatilité « a atteint des niveaux historiquement bas » en 2025. Selon elle, malgré ces obstacles, le bitcoin et l’or pourraient tous deux figurer dans les bilans des banques centrales d’ici 2030, portés par leur rôle commun de valeurs refuges face aux tensions géopolitiques et à l’inflation persistante.
Cette hypothèse, encore prudente, s’inscrit dans un contexte où l’adoption institutionnelle de Bitcoin s’accélère et où certains États envisagent d’intégrer la cryptomonnaie dans leurs réserves stratégiques. Cependant, la volatilité de Bitcoin continue d’inquiéter les banques centrales, dont la mission première reste la préservation de la valeur des actifs de réserve.
Si l’or a déjà reconquis une place historique, le bitcoin reste en observation — mais son évolution récente pourrait bien redéfinir, à terme, la composition des coffres souverains.
L’analyse de la Deutsche Bank révèle un changement profond dans la structure des réserves mondiales. Alors que l’or consolide sa domination, le bitcoin émerge comme une alternative crédible à long terme. Si la prophétie de Marion Laboure se confirme et que les deux actifs cohabitent un jour dans les bilans des banques centrales, le système monétaire international pourrait entrer dans une ère hybride, où valeurs tangibles et numériques se partagent le rôle de bouclier face aux crises.