Les États-Unis jouent une nouvelle carte pour préserver leur domination monétaire mondiale : les stablecoins. Face à l’érosion progressive du dollar comme monnaie de réserve internationale, l’administration Trump mise sur l’expansion réglementée de ces actifs adossés au billet vert. Un virage stratégique qui marque un tournant dans la géopolitique financière. Le rapport publié par la banque crypto Sygnum nous éclaire sur ce positionnement inédit et ses ramifications, tant aux États-Unis qu’à l’international.

Washington mise sur les stablecoins pour renforcer le dollar

L’administration américaine, sous la houlette du président Donald Trump, intensifie ses efforts pour inverser le recul du dollar comme monnaie de réserve mondiale. Selon un rapport récent de la banque crypto Sygnum, les autorités voient dans les stablecoins adossés au dollar un levier potentiel pour renforcer l’influence du billet vert. Cette stratégie s’incarne notamment dans le GENIUS Act, soutenu par le président et ses conseillers crypto, dont David Sacks. Le texte a été approuvé au Sénat le 17 juin 2025 et attend désormais son passage à la Chambre des représentants.

Au cœur de cette dynamique : une demande croissante en dollars dans les pays en développement, confrontés à l’inflation et à la dépréciation de leurs monnaies locales. Le stablecoin libellé en dollar devient alors une alternative crédible pour les populations locales, et potentiellement un outil d’expansion monétaire pour les États-Unis. Katalin Tischhauser, directrice de la recherche chez Sygnum, va plus loin en soulignant que « la dominance des stablecoins en dollars dans l’écosystème crypto peut consolider la suprématie monétaire américaine si l’économie décentralisée continue de se développer massivement. »

Une opposition internationale qui monte en puissance

Alors que Washington tente de consolider sa mainmise via les stablecoins, les signaux de résistance s’intensifient à l’échelle mondiale. Le 16 avril 2025, le ministre italien des Finances a mis en garde contre l’essor des stablecoins libellés en dollars, les qualifiant de menace « plus grande que les tarifs douaniers ». L’Europe n’est pas seule à lever le bouclier. Aux Émirats arabes unis, trois entités d’Abu Dhabi se sont alliées pour lancer un stablecoin adossé au dirham, en attente de validation réglementaire.

En parallèle, des acteurs de marché identifient une demande croissante pour des stablecoins non adossés au dollar. Dea Markova, responsable de la stratégie chez Fireblocks, confie qu’« il existe une demande croissante pour des stablecoins non libellés en dollars, même si leur liquidité reste faible pour l’instant ». Cette perspective souligne un glissement potentiel du centre de gravité financier, où la domination américaine pourrait être challengée, non pas seulement par des États, mais par des technologies et des infrastructures concurrentes.

Les implications d’une telle dynamique sont multiples. D’un côté, les États-Unis pourraient réussir à stabiliser la demande mondiale de dollar grâce aux stablecoins, surtout dans les économies émergentes. De l’autre, l’émergence de monnaies numériques alternatives pourrait entamer cette ambition, voire renforcer la fragmentation du système monétaire international. Le bras de fer ne fait que commencer.