Tandis que les États-Unis s’apprêtent à rejoindre un dispositif mondial de surveillance des actifs numériques, Vitalik Buterin dévoile une nouvelle initiative dédiée à la confidentialité sur Ethereum. Deux mouvements opposés en apparence, mais qui traduisent une même réalité : l’écosystème crypto entre dans une nouvelle phase, marquée à la fois par une réglementation croissante et une exigence de protection des utilisateurs.

Les États-Unis en route vers CARF : Vers une fiscalité crypto mondiale ?

Un tournant stratégique se profile pour la fiscalité des actifs numériques : les États-Unis envisagent de rejoindre le Crypto-Asset Reporting Framework (CARF), un cadre international conçu par l’OCDE en 2022. Ce système vise à instaurer un échange automatique de données entre administrations fiscales sur les portefeuilles de crypto-actifs détenus à l’étranger. À cette fin, le département du Trésor américain a récemment soumis une proposition de règle à la Maison-Blanche, ouvrant la voie à une intégration progressive de ce mécanisme global.

Si elle est adoptée, cette réglementation permettrait au fisc américain d’accéder plus facilement aux données de citoyens américains détenant des crypto-actifs sur des plateformes hors du territoire. Un tel changement pourrait modifier les préférences d’usage, en rendant les plateformes américaines plus attractives par rapport à leurs équivalentes offshore, souvent perçues comme plus opaques.

Gracy Chen, directrice générale de Bitget, estime que cette révision réglementaire représente une étape nécessaire pour mieux intégrer les actifs numériques au sein du système financier traditionnel. Selon elle, renforcer la transparence et la conformité fiscale peut « accroître la confiance des institutions et accélérer l’adoption grand public ».

Le calendrier anticipé par les autorités internationales prévoit une mise en œuvre coordonnée du CARF à l’horizon 2027. Cette échéance offre un délai d’adaptation conséquent pour les plateformes, les régulateurs et les investisseurs. Fait notable, les règles proposées excluent pour l’instant les transactions réalisées via des protocoles de finance décentralisée (DeFi), ce qui pourrait limiter la portée du dispositif sur les usages les plus innovants de la blockchain.

Ethereum accélère sur la confidentialité avec Kohaku

À l’opposé de cette dynamique de transparence institutionnelle, une initiative technologique vient renforcer la confidentialité des transactions sur la blockchain. Lors de la conférence Devcon 2025, Vitalik Buterin a levé le voile sur Kohaku, un cadre open-source conçu pour améliorer la vie privée dans l’écosystème Ethereum.

Kohaku repose sur une architecture modulaire destinée à faciliter la création de portefeuilles privés. Ces outils permettraient aux utilisateurs de dissimuler leurs soldes ou historiques de transaction sans passer par des intermédiaires centralisés. Le cadre s’appuie notamment sur des protocoles existants comme Railgun et Privacy Pools, qui permettent le masquage sélectif des fonds visibles sur la chaîne publique.

Selon Buterin, Ethereum est aujourd’hui dans un « dernier kilomètre » de son évolution en matière de protection de la vie privée. Il souligne que le réseau reste en retard sur cette dimension cruciale, appelant les développeurs à adopter de nouveaux standards plus protecteurs. Kohaku pourrait à terme intégrer des systèmes plus avancés, comme des mixnets ou des navigateurs basés sur les preuves à divulgation nulle de connaissance (zero-knowledge proofs).

Gracy Chen voit dans cette initiative une autre facette de la maturation de l’écosystème crypto. Elle rappelle que « donner aux utilisateurs un véritable contrôle sur leurs données ne va pas à l’encontre des objectifs réglementaires », mais participe plutôt d’une évolution saine, où innovation et régulation progressent ensemble.

Elle insiste également sur le rôle des plateformes comme Bitget, qui peuvent contribuer à créer des cadres équilibrés entre anonymat et responsabilité. Une telle démarche, selon elle, peut « favoriser un dialogue plus constructif entre développeurs et décideurs, soutenant ainsi une croissance durable et une meilleure accessibilité à l’échelle de l’industrie ».

La cryptosphère n’évolue plus en opposition aux institutions, mais en miroir d’elles. Chaque avancée réglementaire appelle une réponse technologique, non pour s’y soustraire, mais pour en redessiner les contours. L’enjeu n’est plus de choisir entre conformité et liberté, mais d’inventer un équilibre où coexistent confiance, confidentialité et souveraineté numérique.