Pendant le marché haussier de 2021, de nombreuses grandes sociétés de minage ont contracté des emprunts massifs pour acheter du matériel et l'infrastructure nécessaire au minage de cryptomonnaies. Pourtant, l'effondrement des exchanges de cryptomonnaies FTX et Celsius a conduit bon nombre de ces sociétés à déposer le bilan.
Le marché baissier actuel, associé aux hashrates élevés du réseau Bitcoin et à la faiblesse des bénéfices, a une fois de plus amené le secteur de la crypto à se demander si les mineurs seront en mesure de récupérer leurs pertes. Bien que cela reste incertain, il est devenu évident que les sociétés de minage se concentrent aujourd'hui davantage sur les ressources énergétiques alternatives afin de réduire les coûts, de garantir les bénéfices et, dans certains cas, de réduire leur impact sur l'environnement.
Sources d'énergie alternatives utilisées par les mineurs
Steven Lubka, directeur général de Swan Bitcoin, une société de services financiers axée sur le bitcoin, a déclaré à Cointelegraph qu'alors que le tarif moyen pour miner un seul bitcoin (BTC) est d'environ 26 000 dollars, les sociétés de minage axées sur les sources d'énergie renouvelables affichent des tarifs compris entre 5 000 et 15 000 dollars par BTC.
Un porte-parole de Riot Blockchain, une société de minage de bitcoins cotée en bourse et basée aux États-Unis, a déclaré à Cointelegraph que l'énergie éolienne et solaire générée à travers le Texas a aidé Riot à garantir certains des coûts les plus bas pour miner de la crypto. « Comme indiqué dans notre dossier d'investisseur du deuxième trimestre, il en coûte à Riot 8 389 dollars pour miner 1 bitcoin. », a-t-il déclaré.
Kent Halliburton, président et directeur de l'exploitation de Sazmining, un fournisseur de services d'hébergement de minage de bitcoins, a déclaré à Cointelegraph que la plus grosse dépense pour le minage a toujours été l'électricité :
« Les mineurs de bitcoins sont naturellement incités à trouver l'énergie la moins chère. L'électricité excédentaire est la moins chère. Avec les énergies renouvelables, il y a souvent un excédent d'électricité, ce qui en fait une solution parfaite pour le minage de bitcoins. »
Halliburton a ajouté que des données indépendantes provenant du Bitcoin Mining Council montrent que le réseau Bitcoin pourrait bien être l'une des industries les plus durables. Selon cette source, 59 % des opérations de minage sont exemptes de carbone et augmentent à un rythme de près de 4,5 % par an.
« Toutes nos opérations de minage dans le Wisconsin et au Paraguay utilisent l'excédent d'hydroélectricité. », a-t-il déclaré.
Le passage à des sources d'énergie alternatives semble être une tendance pour les mineurs qui pensent au succès à long terme. Phil Harvey, PDG du fournisseur d'infrastructure de minage crypto Sabre56, a déclaré à Cointelegraph que l'entreprise travaillait actuellement avec des dizaines de sociétés de minage pour installer des machines dans les trois installations de Sabre56 situées dans le Wyoming et l'Ohio.
M. Harvey a expliqué que le site de Sabre56 à Gillette, dans le Wyoming, connu sous le nom de Bonepile, abrite près de 2 200 machines de minage qui sont alimentées par une combinaison de sources d'énergie, dont une part importante d'énergie renouvelable. Le site, d'une superficie de 5 200 m², s'appuie sur le portefeuille d'énergies mixtes de Basin Electric. Selon le site web de Basin Electric, ce portefeuille comprend 24 % d'énergie éolienne, 0,6 % d'énergie récupérée et 4,3 % d'énergie hydraulique, soit un total de 28,9 % d'énergies renouvelables.
Harvey a déclaré : « Les machines de notre site de Bonepile consistent en un mélange de MicroBT Whatsminer M50 et de Bitmain Antminer S19. En ce qui concerne la conception et la méthodologie du site, nous nous appuyons sur une conception à air pulsé, ce qui signifie que l'air est pulsé dans l'installation pour refroidir les machines. »
Selon M. Harvey, les installations de Bonepile sont conçues de manière à assurer un surplus d'air. Harvey explique que cette méthode réduit la surchauffe et la tension sur l'équipement de minage tout en permettant aux mineurs d'évacuer naturellement l'air chaud par surpression.
« Cela diffère de la conception standard répandue dans l'industrie du minage, qui consiste souvent à extraire l'air chaud à l'aide d'un mécanisme supplémentaire sans avoir de système en place pour aider l'air à pénétrer dans l'installation. », a-t-il fait remarquer.
OceanBit, une société qui développe des plateformes d'énergie renouvelable utilisant des sources thermiques océaniques, adopte une approche différente. Michael Bennett, cofondateur d'OceanBit, a déclaré à Cointelegraph que l'entreprise intégrait le minage de bitcoins dans la conception de sa centrale électrique utilisant l'énergie thermique des océans. « Cela nous permettra d'équilibrer les charges variables, de fournir de l'énergie plus rapidement aux opérations étrangères et de monétiser l'énergie excédentaire pour améliorer la rentabilité de la centrale. », a-t-il expliqué.
Selon M. Bennett, l'énergie thermique des mers est la plus grande source d'énergie inexploitée de la planète. « Il s'agit d'une source d'énergie renouvelable de base, comme l'hydroélectricité ou la géothermie, mais qui utilise la différence de température de l'eau de mer pour produire de l'électricité. »
M. Bennett estime que le bitcoin est la pièce manquante nécessaire à l'adoption de cette source d'énergie à l'échelle mondiale, car il résout un certain nombre de problèmes commerciaux liés à la conversion de l'énergie thermique des océans (ETO).
Nathaniel Harmon, cofondateur et PDG d'OceanBit, explique : « Le sous-produit du processus de génération OTEC est de l'eau froide à quatre degrés Celsius, idéale pour refroidir les ASIC, tandis que le sous-produit des ASIC est de la chaleur de faible qualité, idéale pour être utilisée dans le processus OTEC. Cette combinaison permet d'accroître l'efficacité tout en réduisant le coût des deux procédés. »
M. Bennett a indiqué qu'OceanBit prévoyait de dévoiler sa centrale électrique de recherche et développement à Hawaï en 2024.
Certaines sources d'énergie alternatives sont controversées
Stronghold Digital Mining, une société de minage de cryptomonnaies de Pennsylvanie, utilise des déchets de charbon pour alimenter ses opérations.
Ces déchets, sont le résultat du processus de raffinage de l'exploitation minière du charbon. Ces morceaux de charbon non raffinés, mélangés à du schiste, de l'ardoise ou d'autres impuretés, sont empilés sur des milliers d'hectares de terrains miniers abandonnés en Pennsylvanie.
Greg Beard, PDG de Stronghold Digital Mining, a déclaré à Cointelegraph que son entreprise travaillait avec le Département de la protection de l'environnement de Pennsylvanie et les autorités environnementales locales pour nettoyer les tas de déchets de charbon et les utiliser pour alimenter les opérations de minage de Bitcoin.
Le drainage minier acide provenant de ces piles est l'une des principales sources de pollution de l'eau en Pennsylvanie. Les piles de déchets prennent également feu depuis des décennies par combustion spontanée, libérant une pollution toxique dans l'air. Stronghold convertit les déchets de charbon en électricité grâce à des installations spécialisées et fournit ensuite l'électricité au réseau local ou l'utilise pour miner des bitcoins.
« Le minage de bitcoins est nécessaire pour poursuivre les activités de nettoyage des déchets de charbon, ce qui en fait une opération beaucoup plus efficace que la recherche de sources d'énergie par les mineurs. », a ajouté M. Beard.
Bien que cette méthode permette de nettoyer les tonnes de déchets de charbon, d'un point de vue environnemental, elle pose également un problème.
Les centrales spéciales qui peuvent utiliser des déchets de charbon brûlent toujours des hydrocarbures. La branche de Pennsylvanie du projet Energy Justice Network a même affirmé que les centrales au charbon de rebut polluaient davantage que les nouvelles centrales au charbon.
La société Stronghold elle-même a fait l'objet d'un examen minutieux de la part des groupes de défense de l'environnement lorsqu'elle a demandé un permis pour brûler du combustible dérivé de pneus dans son usine de Panther Creek.
Russell Zerbo, militant du Clean Air Council, a récemment déclaré dans un podcast que l'usine « utilise l'électricité qu'elle produit pour générer de la cryptomonnaie ; au lieu de vendre cette électricité au réseau énergétique, l'usine devrait être complètement autorisée en tant qu'incinérateur de déchets solides qui serait soumis à des exigences accrues en matière de surveillance de la pollution de l'air ».
Les difficultés rencontrées par les mineurs pourraient freiner l'adoption de la crypto
Bien qu'il soit remarquable que les sociétés de minage de cryptomonnaies utilisent des sources d'énergie alternatives, certains défis pourraient entraver l'adoption. Halliburton a affirmé que la désinformation concernant les sources d'énergie alternatives est courante :
« Les populations locales peuvent dresser des barrages parce qu'elles ne réalisent pas que les mineurs de bitcoins apportent un bénéfice net à leurs communautés locales en créant des emplois et en monétisant l'électricité gaspillée ou excédentaire. L'électricité est également mal comprise ; son stockage est extrêmement coûteux, et si l'électricité n'est pas utilisée ou stockée lorsqu'elle est produite, elle est gaspillée - littéralement enfouie dans la terre. »
En outre, les défis liés à l'utilisation des énergies renouvelables sont également évidents. M. Harvey a indiqué que l'altitude de Gillette, dans le Wyoming, se traduit par une qualité de l'air beaucoup plus faible. Ainsi, les machines de l'usine Bonepile de Sabre56 peuvent avoir du mal à aspirer suffisamment d'air pour le refroidissement.
Vient ensuite le problème de la pollution thermique, l'air chaud étant rejeté dans l'atmosphère par les machines de minage, ce que Cointelegraph a pu constater de visu sur le site de Bonepile, dans le Wyoming. Dans ce contexte, certaines sociétés de minage trouvent des moyens uniques de réutiliser la production de chaleur. Par exemple, Genesis Digital Assets utilise l'air chaud produit par les équipements de minage pour cultiver des légumes dans les régions nordiques.
Tout bien considéré, l'avenir des opérations de minage s'appuiera probablement sur des sources renouvelables. Margie Feng, responsable du marketing chez Bitmain - l'un des principaux producteurs d'équipements de minage de cryptomonnaies - a déclaré à Cointelegraph que l'entreprise avait changé de cap et s'efforçait actuellement de promouvoir les technologies de refroidissement par eau, car elle pense que la demande pour ce type d'équipement ne fera qu'augmenter à l'avenir.
Mme Feng a ajouté que Bitmain a constaté que près d'un quart de tous les mineurs de bitcoins utilisent l'eau pour alimenter leurs installations, tandis que l'éolien et le nucléaire sont respectivement les deuxième et troisième contributions les plus importantes.