Le Royaume-Uni envisagerait de vendre pour plus de 5 milliards de livres sterling (environ 6,7 milliards de dollars) de bitcoins saisis afin de combler une partie du déficit budgétaire national.

Selon le Telegraph, le ministère de l’Intérieur et la chancelière de l’Échiquier, Rachel Reeves, collaborent avec les forces de l’ordre pour organiser la liquidation des avoirs en bitcoin (BTC) confisqués. Un système de conservation sécurisé serait en cours de mise en place en amont de cette opération.

Une telle vente pourrait freiner la reprise haussière récente du Bitcoin et du marché crypto dans son ensemble.

Au Royaume-Uni, la vente d’actifs numériques saisis relève normalement des forces de police. Mais selon les informations rapportées, le Trésor s’impliquerait dans ce dossier en raison de la hausse du marché, qui a renforcé la valeur des avoirs détenus par l’État.

Le montant exact de bitcoins saisis reste inconnu, mais au moins 61 000 BTC — actuellement évalués à environ 7,1 milliards de dollars — proviendraient d’un système de Ponzi chinois démantelé en 2018, dont les fonds étaient localisés au Royaume-Uni.

L’hypothèse d’une vente des bitcoins détenus par le Royaume-Uni avait déjà circulé plus tôt cette année. En janvier, The Daily Mail et The Times rapportaient que Rachel Reeves pourrait envisager cette option afin de réduire le déficit budgétaire du pays.

Cointelegraph a contacté le Trésor de Sa Majesté pour obtenir une réaction officielle.

Les victimes du système de Ponzi réclament la restitution des bitcoins détenus par le Royaume-Uni

Cependant, le projet du Royaume-Uni de vendre ces bitcoins pourrait se heurter à l’opposition des victimes d’un système de Ponzi chinois, qui réclament la restitution des fonds depuis 2024.

« Le bitcoin détenu par le Royaume-Uni fait toujours l’objet d’un litige juridique », a déclaré dimanche Susie Violet Ward, directrice de l’organisation Bitcoin Policy UK, dans un message publié sur X. Elle a vivement critiqué le rapport, le qualifiant de « sensationnalisme sans fondement ».

« Les autorités chinoises et les victimes exigent la restitution des fonds. Aucune vente ne pourra avoir lieu tant que la procédure judiciaire ne sera pas terminée », a-t-elle ajouté.

Source: Susie Violet Ward

Le Royaume-Uni a saisi les bitcoins en 2018 après que Jian Wen, une employée du secteur de l’hôtellerie, a tenté de blanchir les fonds d’un système d’investissement frauduleux orchestré par la société Tianjin Lantian Gerui Electronic Technology, notamment en cherchant à acheter une villa avec du BTC.

Poursuivie pour trois chefs d’accusation liés au blanchiment d’argent, Wen a nié les faits mais a été reconnue coupable en mars 2023, puis condamnée à six ans et huit mois de prison en mai 2024.

En avril 2024, un collectif représentant les victimes de l’arnaque a saisi le ministère chinois des Affaires étrangères afin d’ouvrir des négociations avec le Royaume-Uni pour obtenir la restitution des bitcoins.

Le Royaume-Uni souhaite conserver les bitcoins saisis

Parallèlement, le Crown Prosecution Service a demandé à la Haute Cour l’autorisation de conserver les bitcoins saisis dans le cadre de cette affaire. Si la demande est acceptée, les fonds pourraient être vendus, puis redistribués entre différentes agences chargées de l’application de la loi.

Freddie New, responsable des politiques publiques chez Bitcoin Policy UK, a précisé dimanche sur X que toute vente de ces crypto-actifs relèverait des lois sur les produits du crime. Celles-ci prévoient que les actifs soient liquidés pour satisfaire à des ordonnances de confiscation, voire pour indemniser les victimes si la justice en décide ainsi.

« À notre connaissance, les victimes ont perdu des yuans, pas du bitcoin. Cela complique encore la situation, d’autant plus que des démarches diplomatiques seraient en cours pour réclamer les bitcoins en lieu et place de la monnaie d’origine », a-t-il ajouté.

Selon Freddie New, une fois les frais couverts et les victimes éventuellement indemnisées, les fonds restants iraient au Trésor et pourraient être partagés entre les entités ayant participé à la récupération des actifs, comme les forces de police.

En mai, le Royaume-Uni avait lancé un appel d’offres d’un montant de 40 millions de livres sterling (environ 53,7 millions de dollars) pour mettre en place un cadre de stockage et de gestion des cryptomonnaies saisies à destination des forces de l’ordre. Ce projet a été annulé au début du mois, le gouvernement ayant indiqué n’avoir reçu aucune proposition capable de répondre aux exigences fixées.

Le Royaume-Uni de nouveau incité à constituer des réserves de bitcoin

Freddie New a indiqué que Bitcoin Policy UK avait adressé une lettre au gouvernement en juillet 2024, lui recommandant de modifier la législation afin de s’accorder davantage de latitude pour conserver cet actif de grande valeur. Une demande restée sans réponse, selon lui.

De son côté, Jordan Walker, fondateur du groupe de défense Bitcoin Collective, a publié une lettre ouverte appelant les autorités à renoncer à la vente des bitcoins, en réaction aux révélations du Telegraph.

« Vendre ces avoirs pour combler un déficit budgétaire à court terme enverrait un signal inquiétant », a-t-il prévenu, ajoutant que cela pourrait entraîner « des conséquences durables sur la position économique du Royaume-Uni ».