Le New Hampshire frappe fort. L'État devient le premier aux États-Unis à instaurer une réserve stratégique de bitcoin (BTC) via des fonds publics. Une décision politique audacieuse qui propulse les cryptomonnaies dans le domaine des finances étatiques, à contre-courant des hésitations observées ailleurs.

Le New Hampshire adopte une législation inédite sur le bitcoin

Le 6 mai 2025, la gouverneure Kelly Ayotte a promulgué la loi HB 302. Ce texte autorise le trésor public du New Hampshire à investir jusqu’à 5 % de ses réserves dans des actifs tangibles comme les métaux précieux, mais surtout dans des actifs numériques dont la capitalisation dépasse 500 milliards de dollars. En l’état actuel du marché, seul le bitcoin remplit ce critère.

Les modalités de détention de ces actifs prévoient une garde sécurisée ou une exposition via un produit négocié en bourse (ETP), confiés au soin du trésorier de l’État. Cette approche mixte entre sécurité institutionnelle et flexibilité financière place l’État dans une posture de gestion patrimoniale active vis-à-vis du bitcoin.

Pour Ryan Lee, analyste en chef chez Bitget Research, cette initiative marque une étape déterminante. « Le New Hampshire devient le premier État américain à approuver une réserve de cryptomonnaies. La loi positionne le bitcoin comme un actif de réserve légitime » a-t-il déclaré. Lee a par ailleurs souligné que cette reconnaissance officielle pourrait contribuer à stimuler la demande institutionnelle et à inspirer d’autres juridictions à suivre le même chemin.

Une rupture stratégique face à l’immobilisme fédéral et étatique

La singularité de cette initiative s’apprécie d’autant plus à la lumière de l’échec d’autres projets similaires ailleurs aux États-Unis. En Arizona, le gouverneur a mis son veto à une proposition équivalente le 2 mai. En Floride, les textes introduits ont été retirés le 3 mai, sans même parvenir à un vote.

Sur le plan fédéral, Donald Trump a signé en mars un décret créant une "Réserve stratégique de Bitcoin". Ce texte prévoit toutefois uniquement l’usage des BTC déjà détenus par le gouvernement, sans nouvelles acquisitions prévues. Il s’agit donc d’un acte symbolique plus que financier. Par contraste, la sénatrice Cynthia Lummis, dans son projet de loi BITCOIN Act, avance que l’État fédéral pourrait disposer de plus d’un million de BTC issus de saisies judiciaires.

Dans ce contexte, la décision du New Hampshire introduit une rupture claire. Il ne s’agit plus d’explorer une éventualité, mais de mettre en œuvre un cadre concret et opérationnel. Comme le souligne Ryan Lee, « la loi du New Hampshire pourrait inciter les régulateurs fédéraux à clarifier les règles relatives aux cryptos, dans un contexte d’inquiétude croissante quant à la dévaluation de la monnaie fiduciaire ». Il précise néanmoins que « la volatilité du bitcoin pourrait ralentir l’évolution de la réglementation ».

Vers une nouvelle norme institutionnelle ?

L’impact de la loi HB 302 dépasse largement les frontières du New Hampshire. En prenant cette décision, l’État ouvre une brèche potentielle dans le cadre d’adoption institutionnelle du bitcoin aux États-Unis. Ce geste peut être interprété comme une pression indirecte sur les autorités fédérales pour accélérer la formalisation d’une stratégie cohérente en matière de cryptomonnaies.

Ryan Lee observe que « le cadre clair de la loi pourrait encourager les États à explorer les réserves de bitcoins ». Selon lui, « 28 États envisagent déjà des projets similaires », et la dynamique actuelle pourrait contribuer à structurer le débat au Congrès, notamment autour de textes comme la Financial Innovation and Technology Act. À plus long terme, Lee estime que « cette initiative pourrait même inciter certaines juridictions internationales, notamment dans les marchés émergents, à considérer le bitcoin comme un actif de réserve potentiel ».

Si l’initiative du New Hampshire s’avère efficace d’un point de vue budgétaire ou stratégique, elle pourrait servir de modèle à d’autres entités publiques. Dans un environnement où la stabilité monétaire est remise en question, la diversification vers des réserves numériques pourrait gagner en légitimité politique et financière.