La Fédération américaine du travail et Congrès des organisations industrielles (AFL-CIO), principale union de syndicats aux États-Unis, a fait part de ses « sérieuses préoccupations » concernant le projet de loi du Sénat visant à encadrer le secteur crypto. Selon elle, le texte ne protège pas les travailleurs et régule mal l’industrie.
L’organisation s’oppose au Responsible Financial Innovation Act (RFIA), arguant dans une lettre adressée mardi au Comité sénatorial des banques que cette législation ferait peser des risques importants sur les salariés et sur la stabilité du système financier américain.
Selon Jody Calemine, directeur de l’AFL-CIO, la manière dont le texte traite les actifs crypto « met en danger les fonds de retraite et la stabilité économique globale des États-Unis ».
Il ajoute que le projet permettrait à l’industrie crypto « d’opérer plus largement et plus profondément dans le système financier, sans supervision adéquate ni véritables garde-fous ».
Les sénatrices Cynthia Lummis et Kirsten Gillibrand ont initialement présenté le RFIA en 2022 avant de le réviser plus tôt cette année. Le Comité sénatorial des banques élabore actuellement cette version comme une alternative au CLARITY Act, un autre projet de loi sur la structure des marchés adopté par la Chambre des représentants en juillet.
Protéger les travailleurs et les retraités
Calemine précise que l’AFL-CIO soutient les efforts visant à moderniser les régimes de régulation pour mieux protéger les travailleurs de la volatilité des cryptos. Mais selon lui, le projet de loi ne fait que donner l’illusion d’une réglementation.
Il a ajouté qu'au lieu de protéger les travailleurs contre la volatilité des cryptos, le projet de loi « augmenterait leur exposition en autorisant les plans de retraite tels que les 401(k) et les pensions à détenir ces actifs risqués ».
Des risques systémiques accrus
Calemine met également en garde contre l’impact potentiel sur le Deposit Insurance Fund, le fonds public qui garantit les dépôts bancaires des particuliers. Si les banques étaient autorisées à garder des cryptos en dépôt, cela exposerait les contribuables à davantage de risques, estime-t-il.
Il ajoute que la législation « institutionnaliserait la tokenisation des titres et des actifs », permettant ainsi à des entreprises privées de créer un « marché boursier parallèle » échappant à la supervision de la Securities and Exchange Commission (SEC).
Siège social de l'AFL-CIO à Washington, DC. Source : AFL-CIO
Le spectre d’une nouvelle crise de 2008
L’AFL-CIO compare ces risques potentiels à ceux qui ont conduit à la crise financière de 2008, provoquée par les prêts à haut risque des banques commerciales.
« Si les banques se mettent à pratiquer des activités de trading de type hedge funds basées sur les cryptos — ce que ce cadre autoriserait —, cela pourrait s’avérer encore plus dangereux que certaines pratiques financières risquées observées avant la crise de 2008 », avertit Calemine.
Le directeur de l’AFL-CIO conclut en appelant le Sénat à rejeter le Responsible Financial Innovation Act, qui demeure pour l’instant à l’état de projet de discussion et n’a pas encore été officiellement déposé.