Après 43 jours de paralysie administrative, la Securities and Exchange Commission (SEC) et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) reprennent enfin leurs opérations normales. Cette mise à l’arrêt historique, provoquée par l’absence de budget fédéral, a profondément affecté les capacités de supervision et de traitement de dossiers de ces deux piliers de la régulation financière américaine. Dans un écosystème crypto déjà sous pression réglementaire, le timing n’aurait pas pu être plus critique. Que s’est-il passé exactement pendant ces semaines d’inactivité ?
Un gel des opérations critiques pendant 43 jours
Dès le début du shutdown, les opérations de la SEC et de la CFTC ont été drastiquement réduites. Selon leurs plans d'urgence respectifs, les deux agences ont été contraintes de suspendre l’essentiel de leurs activités. Pour la CFTC, cela incluait notamment « la quasi-totalité de ses opérations, y compris l’application des règles, la surveillance du marché et l'élaboration réglementaire ». Du côté de la SEC, la situation n'était guère plus encourageante : l'examen des demandes de fonds négociés en bourse (ETF), y compris ceux liés aux cryptos, a été mis en pause.
Cette paralysie n’a pas empêché certains acteurs du marché de prendre les devants. Comme l’a expliqué Jay Dubow, avocat chez Troutman Pepper Locke : « Je suis sûr que certaines [entreprises] ont décidé de soumettre [leurs demandes] à la SEC, en sachant qu'elles ne seraient pas examinées immédiatement, mais au moins, elles sont dans la file d’attente. » En coulisses, les espoirs d’un redémarrage rapide ont encouragé des dépôts de dossiers de levées de fonds, IPO et ETF crypto, malgré l’absence temporaire de traitement.
Réorganisations internes et incertitudes réglementaires à venir
Au-delà de l’inertie opérationnelle, ce shutdown a mis en lumière un autre problème : l’instabilité au sommet des agences. Michael Selig, avocat principal de la task force crypto de la SEC et pressenti pour devenir président de la CFTC, doit encore passer devant le Sénat. En cas de confirmation, il succédera à Caroline Pham, mais même avec cette nomination, la CFTC resterait sous-dotée en gouvernance : « un seul commissaire confirmé sur les cinq habituels ».
Ce vide institutionnel pourrait retarder d'autres décisions critiques, comme l’approbation de produits crypto à effet de levier, pourtant évoqués dès décembre. Le shutdown a aussi gelé des projets majeurs. Paul Atkins, président de la SEC, a indiqué dès le 7 octobre que l’agence envisageait de « mettre en place une taxonomie des tokens ancrée dans le test de Howey », avec pour objectif de reconnaître que « les contrats d’investissement peuvent prendre fin ». Des discussions suspendues, alors même qu'elles pourraient redéfinir l'encadrement légal des cryptos à moyen terme.
La réouverture de la SEC et de la CFTC marque un soulagement administratif, mais laisse en suspens de nombreuses interrogations. La paralysie a non seulement retardé les processus d’approbation, mais mis à nu les failles de gouvernance au sein des institutions clés. Pour l’industrie crypto, les semaines à venir seront cruciales : entre décisions en attente, potentielle réforme réglementaire et nouveau leadership, les cartes pourraient être rebattues.