Alors que le réseau Ethereum consolide sa position dans l’écosystème des blockchains, Vitalik Buterin propose une piste stratégique pour renforcer son modèle économique. À contre-courant des dynamiques spéculatives dominantes, il mise sur une DeFi à faible risque, capable de générer des frais réguliers tout en respectant les valeurs fondamentales de la plateforme.

La DeFi à faible risque, nouvelle poule aux œufs d’or d’Ethereum ?

Dans une récente déclaration, Vitalik Buterin suggère que les protocoles de finance décentralisée à faible risque pourraient devenir une source majeure de revenus pour Ethereum. Il établit un parallèle avec Google, dont le moteur de recherche, bien que peu spectaculaire, constitue le cœur de la rentabilité de l’entreprise.

De la même manière, Ethereum pourrait s’appuyer sur des services stables, sans nécessairement rechercher l’innovation la plus flamboyante. Les données récentes donnent du crédit à cette vision. Sur Aave, l’un des protocoles DeFi les plus établis, les taux d’intérêt pour le dépôt de stablecoins de référence comme l’USDC ou l’USDT atteignent 5 %, et peuvent grimper à plus de 10 % pour des actifs légèrement plus risqués.

Ces rendements attirent les investisseurs en quête de stabilité, contribuant à une augmentation significative de l’activité sur la blockchain. La valeur totale verrouillée (TVL) dans la DeFi sur Ethereum vient ainsi de franchir le seuil des 100 milliards de dollars, pour la première fois depuis le début de l’année 2022.

Plutôt que de chercher la nouveauté à tout prix, Buterin préconise une approche pragmatique : « La principale source de revenus [pour Ethereum] n’a pas besoin d’être l’application la plus excitante, tant qu’elle n’est ni contraire à l’éthique ni embarrassante pour l’écosystème. » Ce positionnement marque une volonté de construire un socle économique plus robuste et plus pérenne pour le réseau.

Entre éthique, adoption et innovation monétaire, un fragile équilibre

Cette orientation soulève une question stratégique : comment concilier l’idéalisme historique d’Ethereum avec les réalités économiques de l’écosystème ? Les cas d’usage les plus visibles — NFTs, memecoins, trading à levier — génèrent certes des frais importants, mais véhiculent aussi une image controversée.

En revanche, les applications non-financières ou semi-financières, plus conformes aux idéaux d’inclusion et de transparence, peinent à trouver un modèle économique viable. Dans ce contexte, les protocoles DeFi jugés “low-risk” pourraient jouer un rôle central. Ils permettraient de financer le fonctionnement du réseau tout en servant d’alternative crédible aux modèles plus spéculatifs.

Pour renforcer cette dynamique, Buterin évoque plusieurs innovations monétaires, comme les flatcoins — des actifs numériques dont la valeur est indexée non pas sur une devise, mais sur un indice du coût de la vie. Il imagine aussi des cryptomonnaies adossées à un panier de devises, offrant une diversification automatique et une meilleure résilience.

Ces approches soulèvent néanmoins des défis techniques et réglementaires. La conception d’actifs réellement stables, résilients aux chocs de marché et transparents dans leur gouvernance reste un chantier ouvert. De plus, la compatibilité de ces instruments avec les régulations financières existantes devra être soigneusement étudiée pour assurer leur viabilité à long terme.

L’appel de Vitalik Buterin à recentrer la stratégie économique d’Ethereum autour de la DeFi à faible risque trace une voie plus sobre, mais potentiellement plus durable. En cherchant à concilier rendement, sécurité et alignement avec les valeurs fondatrices de la blockchain, cette approche pourrait inaugurer un nouveau cycle d’adoption et de légitimation pour Ethereum. Le défi sera désormais de transformer cette vision en réalité concrète, sans céder aux sirènes de la facilité spéculative.