Depuis quelques mois, l’industrie crypto guette chaque mouvement des gestionnaires d’actifs traditionnels comme VanEck, à l'affût de leur degré d'engagement envers les blockchains majeures. En mai, l’annonce d’un ETF adossé au BNB de Binance avait marqué une nouvelle étape dans l’adoption des cryptomonnaies par la finance institutionnelle. Mais coup de théâtre : dans une mise à jour récente de son dossier auprès de la SEC, VanEck retire subitement toute référence au staking de BNB. Un recul discret, mais significatif, qui soulève autant de questions que d’interprétations. Décryptage.

Une volte-face silencieuse sur fond de prudence réglementaire

Dans sa dernière version du formulaire S-1 déposée auprès de la SEC, VanEck déclare sans ambiguïté qu’aucun BNB détenu dans le cadre de l’ETF ne sera staké, ni au lancement, ni dans un avenir prévisible. L’entreprise va même plus loin : elle précise qu’aucune garantie n’est donnée quant à un éventuel recours au staking, ajoutant qu’un prospectus dédié devrait précéder toute évolution dans ce sens. Ce changement est d’autant plus notable qu’en mai dernier, VanEck mentionnait explicitement la possibilité de staker une partie des actifs crypto du fonds via des prestataires tiers de confiance.

Cette révision intervient alors que VanEck a récemment lancé un ETF sur Solana (SOL), incluant cette fois-ci des revenus issus du staking. La différence de traitement interroge. D’autant que VanEck reconnaît lui-même que l’absence de staking pourrait entraîner une sous-performance du fonds par rapport à une détention directe de BNB. En clair, les investisseurs institutionnels qui espéraient bénéficier des rendements du staking devront s’en passer pour des raisons qui semblent, pour l’heure, moins techniques que juridiques.

Staking et régulation : Lee risque BNB au cœur des inquiétudes

La prudence de VanEck semble étroitement liée à la situation réglementaire trouble entourant BNB. Dans le document mis à jour, la société admet : « Le BNB peut actuellement être considéré comme un titre, sur la base des faits tels qu'ils se présentent aujourd'hui, ou peut à l'avenir être considéré comme tel par la SEC ou un tribunal fédéral. » Elle ajoute que si le BNB venait à être qualifié de titre, cela pourrait entraîner la dissolution du fonds. Même si VanEck indique qu’elle ne prendra pas cette décision de manière préventive, l’ombre d’un classement juridique défavorable plane clairement sur le projet.

Ce recul s’inscrit dans un contexte plus large : en 2023, la SEC a poursuivi Binance, Coinbase et Kraken pour la vente de titres non enregistrés, le BNB figurant dans la liste des 68 actifs crypto concernés. Certes, une décision de justice a estimé que les ventes secondaires de BNB ne constituaient pas des transactions de titres financiers, mais le flou réglementaire persiste. En mai 2024 encore, la SEC a affirmé que certaines activités de staking ne relèvent pas de l’obligation d’enregistrement sans trancher clairement pour tous les cas.

En conclusion, le retrait du staking sur le BNB par VanEck pourrait préfigurer un changement de stratégie plus large chez les émetteurs d’ETF crypto. Face à l’incertitude réglementaire, notamment aux États-Unis, les gestionnaires préfèrent souvent renoncer à certaines fonctionnalités plutôt que de s’exposer à des poursuites ou à une dissolution forcée de leurs produits. L’affaire VanEck-BNB pourrait bien être un cas d’école des compromis entre innovation crypto et conservatisme institutionnel.